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Expositions

Le Havre, les francs-maçons & la mer

XVIIIe - XIXe siècles

11
mai
2019
>
30
sep
2019
Abbaye de Graville

La franc-maçonnerie venant d’Angleterre, se développe très largement au XVIIIe siècle, grâce à un maillage maritime fort. L’exposition qui se tient au Havre, mise œuvre par les Musées d’Art et d’Histoire, s’appuie sur les dernières recherches. Le commissaire scientifique est Eric Saunier, Directeur de l’IDERM (Institut d’études et de recherches maçonniques), en partenariat avec le musée de la franc-maçonnerie dirigé par Pierre Mollier et Jean-François Masse maçonnologue.

Dans un premier volet, il s’agit de replacer la naissance de la franc-maçonnerie dans son contexte historique, rappeler ses fondements et donner des éclairages sur le rituel ou la symbolique de l’objet. Une partie des œuvres et objets exposés en 2015 dans l’exposition Les francs-maçons et la mer, qui s’est tenue dans les locaux parisiens du Grand Orient, est à nouveau visible au Havre, s’y ajoutent des pièces rares, venant de collections publiques ou privées, havraises ou extérieures au Havre. Les relations suivies avec les populations, pour faire ressurgir des objets inconnus du public sont une des marques des Musées d’Art et d’Histoire.

Dans un deuxième volet, l’exposition met en relief des acteurs havrais des XVIIIe et XIXe siècles édiles, médecins, scientifiques ou artistes de premier plan, remarqués pour leur appartenance à la franc-maçonnerie.

Un troisième volet enfin, évoque deux personnages emblématiques, le premier, le chanoine Pingré, religieux qui a résidé dans l’abbaye de Graville et s’est fortement intéressé à la cosmographie au point de fonder l’observatoire de Paris. Dignitaire de la franc-maçonnerie, il fut portraituré par les plus grands. Le second, très actif en maçonnerie et dignitaire lui-même, est le marquis de la Lafayette, qui fut fort attaché au Havre pour y avoir séjourné à plusieurs reprises, soutenu dans cette ville par des réseaux maçonniques maritimes solides.

Sont présentés à cette occasion, un magnifique ensemble d’objets : tabliers, bijoux, diplômes, épées maçonniques, ainsi que des portraits et estampes de la plus grande qualité.

 

pommeau de l'épée

La franc-maçonnerie du XVIIIe au XIXe siècle, une sociabilité maritime

Née en 1717 en Angleterre à Londres par la réunion de quatre loges en Grande Loge, la franc-maçonnerie entretient dès ses débuts une relation privilégiée avec le monde maritime. Avant même la parution des Constitutions d’Anderson (1723), c’est dans le port de Rotterdam qu’elle s’est installée pour la première fois sur le continent européen, en 1721. Dix ans plus tard, lorsque la franc-maçonnerie commence à se répandre dans le royaume de France où elle a vu le jour à Paris en 1725 avec la formation des loges Saint-Thomas, c’est dans le port de Bordeaux, à l’initiative du capitaine de navire Martin Kelly, que la première loge provinciale, L’Anglaise, est fondée le 17 avril 1732. Sa mise en sommeil rapide, entre le 30 septembre 1733 et le 29 juin 1735 puis entre le 27 décembre 1735 et le 26 février 1736, témoigne de la domination des gens de mer dans ses rangs.

Pour un marin, qu’il soit anglais, français ou de tout autre nationalité, il y a donc une véritable attirance pour la franc-maçonnerie. Elle va jusqu’à donner naissance à des loges « embarquées » au milieu du XVIIIe siècle, à l’initiative de Thomas Dunckerley, un officier de la Navy que l’historiographie considère comme le père de cette franc-maçonnerie maritime que des « loges de recherche » essaient de pérenniser de nos jours.[…]

Ces fortes affinités entre franc-maçonnerie et monde maritime ont fait naître lieux et figures emblématiques de la franc-maçonnerie maritime. Si Thomas Dunckerley, qui fonda trois loges à bord de bateaux de la Navy entre 1755 et 1761, et le bailli Suffren, qui fréquenta la célèbre société de concert maçonnique La Société olympique, sont les figures les plus connues de la franc-maçonnerie maritime du XVIIIe
siècle, c’est au début du XIXe siècle, durant l’époque napoléonienne, que celle-ci voit émerger les hommes les plus représentatifs de ses valeurs, comme le commodore Sidney Smith (1764-1840), et l’amiral Étienne Eustache Bruix (1759-1805) dont la carrière maçonnique permet d’évoquer la vie maçonnique à Brest, qui est sans doute la ville portuaire la plus emblématique de la franc-maçonnerie maritime. […]

Les francs-maçons brestois devinrent, de concert avec ceux du Havre, la cheville ouvrière d’un réseau d’entraide unissant toutes les loges portuaires autour de gestes de solidarité dont profitèrent des frères en lutte contre l’ordre imposé en Europe par la Sainte Alliance. […]

Restée fidèle à la pratique de l’entraide, la franc-maçonnerie maritime est touchée au XIXe siècle, dans les pays où s’épanouit la franc-maçonnerie libérale, par une politisation qui fit des francs-maçons de solides accompagnateurs du combat pour les libertés.

Éric Saunier, directeur de l’IDERM

Le Havre : la franc-maçonnerie dans un port maritime (1738-à la fin du XIXe siècle)

Dix ans après son apparition dans le royaume de France, au début du règne de Louis XV, la franc-maçonnerie apparaît au Havre. Elle s’organise rapidement autour de l’activité de deux loges reconnues par le Grand Orient de France : La Fidélité et L’Aménité, et représente un modèle de « la franc-maçonnerie maritime ». Au XVIIIe siècle, deux tiers des 200 maçons havrais sont officiers de marine ou négociants armateurs et, jusqu’à la Révolution, ces loges développent un réseau de relations avec celles du Nord de l’Europe et des colonies antillaises.

A la différence de la plupart des villes de province, la période révolutionnaire se caractérise au Havre par son dynamisme maçonnique. Deux nouvelles loges sont ouvertes : Les Trois Haches, en 1794 (cette loge prend le nom de 3 H au début du premier Empire) et Les Vrais Amis, en 1796.

L’identité maritime de la franc-maçonnerie havraise s’efface alors temporairement avant de retrouver un nouvel éclat à partir des années 1830. La sociologie des 3 H et la naissance de L’Olivier Ecossais n° 38 - un des premiers ateliers reconnus par le Suprême Conseil de France - très ouvert vers le monde de la mer, ravivent une tradition qui perdure jusqu’au XXe siècle.

Indépendamment de cette originalité culturelle, les loges havraises, comme la plupart des loges provinciales, développent une constante activité philanthropique, en lien, au XVIIIe siècle avec les Églises puis en concurrence au XIXe siècle. A travers leurs actions en faveur de l’éducation populaire, elles participent activement à la républicanisation de la société havraise.

Au début du XXe siècle, la franc-maçonnerie havraise s’ouvre à la mixité avec la naissance de la Loge n° 5, reconnue par le Droit Humain en 1902. Le Havre de grâce lodge n° 4, dépendant de la Grande Loge indépendante et régulière pour la France et ses colonies, obédience reconnue par la Grande Loge Unie d’Angleterre, ouvre en 1916.

Diplôme sur parchemin

Quelques mots clefs

Apprenti : terme de la franc-maçonnerie emprunté au vocabulaire des
tailleurs de pierre pour désigner l’initié au premier grade de la francmaçonnerie.

Bleu : adjectif accolé à la franc-maçonnerie des trois premiers grades dits symboliques (apprenti, compagnon et maître).

Cabinet de réflexion : lieu orné d’un décor et d’objets symboliques dans
lequel est placé l’impétrant avant son initiation.

Chapitre : structure maçonnique correspondant à la loge aux grades supérieurs aux trois premiers grades.

Colonne : place dans le temple où se disposent les frères, les apprentis obligatoirement sur la colonne du Nord (ou septentrion), les compagnons sur celle du Sud. 

Compagnon : nom donné à l’initié au second grade de la franc-maçonnerie symbolique. 

Grade : degré d’évolution en franc-maçonnerie divisé en trois grades dits symboliques, puis en grades de perfection dont le nombre varie selon les rites. 

Loge : terme d’origine anglaise désignant chez les francs-maçons le local de réunion des frères.

Maître : terme de la franc-maçonnerie désignant le franc-maçon ayant
atteint le troisième grade symbolique.

Obédience : association ou fédération de loges placée sous une juridiction particulière. 

Tablier : décor du maçon composé généralement d’une bavette triangulaire et d’un rectangle. 

Temple : terme désignant le lieu où se déroulent les tenues, réunions
maçonniques.

Vénérable : nom de l’officier qui préside les travaux d’une loge symbolique.

Symboles maçonniques d’origine ouvrière

Le Niveau : Correspond à la mise en oeuvre correcte des connaissances, à la rigueur, à la justice mais aussi à l’égalité entre les hommes, à une notion d’altruisme. 

La Règle : Si elle est graduée, symbolise la méthode, la précision dans l’exécution, la droiture morale ; non graduée, elle est symbole d’infini. 

L’Equerre : Renvoie à une régularité et à une perfection dans l’exécution du travail. Elle souligne ce qui est droit et corrige ce qui ne l’est plus ou pas. L’équerre est symbole d’honnêteté et de vertu.

Le Compas : Représente la sagesse de l’esprit. La sagesse qui contrôle et mesure, et l’esprit libre qui apporte créativité.

Le Ciseau : Il est symbole de détermination. Il allie force et raison.

Le Maillet : Il évoque la force matérielle constante, la puissance, l’intelligence qui agit. Il marque l’ouverture et la clôture des « temps » affectés à telle ou telle activité.

La Truelle : Elle renvoie à une égale répartition, à une juste cohésion.

Le Tablier : Représente la nécessité du travail et le bénéfice moral qui s’en dégage.

La Pierre brute : Correspond aux imperfections de la nature humaine et au travail nécessaire pour retrouver une liberté et ouverture d’esprit.

La Pierre taillée : C’est la pierre polie, sans imperfection, c’est le travail
effectué, la plénitude.

Commissariat général : Le commissariat général est assuré par Elisabeth Leprêtre, directeur et conservateur en chef des Musées d’Art et d’Histoire du Havre. 

Le commissariat général adjoint est assuré par Emmanuelle Riand, attachée de conservation au pôle des collections des Musées d’Art et d’Histoire du Havre.

Commissariat scientifique : Le commissariat scientifique est assuré par Eric Saunier, directeur de l’IDERM (Institut d’études et de recherches maçonniques) en partenariat avec Pierre Mollier, conservateur du Musée de la franc-maçonnerie et Jean-François Masse maçonnologue.

Catalogue : Le Havre les francs-maçons et la mer, XVIIIe-XIXe siècle, éditions Octopus, Oissel-sur-Seine, 2019. Prix : 20€

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Affiche de l'exposition
Dossier de presse- le Havre, Les francs-maçons & les mer